Dans La sagesse d’aimer, salué pour la qualité de son écriture et couronné par le Prix Seligmann 2017 contre le racisme, l’actrice et philosophe Zarina Khan avait entamé le récit du « roman vrai » de sa singulière destinée.
Nous l’avions laissée au sortir de l’enfance, en pleine adolescence tourmentée, hésitant à rejoindre son père à Karachi ou sa mère à Moscou. Nous la retrouvons à l’ambassade d’Allemagne dans la froideur oppressante de la Russie des années soixante-dix, confrontée à l’incandescence du volcan de son être, à l’amour naissant, véritable « forge solaire » où s’édifie son individualité. Le spectre du nazisme et le visage de son beau-père qui la tyrannise en viennent à se confondre. Cependant, en vraie « contrebandière de la liberté », elle va peu à peu s’ouvrir un chemin à travers philosophie, jubilations littéraires, et le théâtre qui redonne sa place au corps meurtri. C’est alors qu’elle élabore des outils « pour la paix » qui l’emmèneront plus tard dans les zones de conflit et les pays en guerre…
EXTRAIT:
« Cet été-là, quelques couvercles se soulèvent. J’aborde avec ma mère le sujet tabou: Helmut. Sais-tu qu’il prenait le thé avec Hitler dans l’Obersalzberg, cette montagne bavaroise où il avait sa résidence secondaire? Une gorgée du poison doré descend dans sa gorge qui se tait. Elle hoche la tête. Qu’il était le meilleur ami de Horst Wessel, celui qui a écrit le chant des SA qui est devenu ensuite l’hymne du parti nazi ?
Qu’il était SA lui même, c’est à dire de la Sturmabteilung, – le détachement Tempête – qui a porté Hitler au pouvoir et engendré les SS? Ses yeux verts sont opaques, lacs frappés d’une maladie soudaine qui les rongeraient en leur tréfonds. Ton mari a écrit en 1935 La communauté du peuple allemand, un livre où il dit que «seule l’harmonie entre l’âme et la race d’un peuple permet la foi inébranlable du peuple en lui-même et sa mission éternelle…». Des mots de nazi…
Le briquet claque. Elle sait, elle a toujours su.
Elle soupire: on ne peut pas continuer la guerre, lorsqu’elle est finie, elle est finie.
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